La Reprise de Logement : Qui, Quand et Comment?.

Vous désirez faire une reprise de logement dans votre immeuble? Cet article vous servira de guide pour connaître les tenants et les aboutissants de cette procédure. En effet, on commencera par y expliquer les différents critères théoriques à posséder pour faire une reprise en bonne et due forme, puis les aspects procéduraux à suivre. Avant de commencer, il faut préciser que le but de la reprise de possession est que le bénéficiaire habite le logement repris de façon permanente. On comprend donc qu’on ne reprend pas le logement pour, par exemple, en évincer un locataire à troubles, en faire un commerce ou pour habiter quelque part temporairement le temps que notre propriété se fasse rénover.

Le premier critère à remplir vise le propriétaire de l’immeuble. L’article 1958 du Code civil du Québec (ci-après « C.c.Q ») prévoit que l’immeuble doit être détenu par une personne physique seule, ou par des conjoints. On comprend donc qu’une personne morale détenant un immeuble ne pourra y faire de reprise de logement, tout comme les immeubles détenus par plusieurs copropriétaires qui ne sont pas conjoints (exemple : un père et son fils qui détiennent un duplex ensemble).  Cet article prévoit que le propriétaire doit également posséder la qualité de locateur. Ces termes sont utilisés de manière interchangeable dans le langage courant, mais ils ne sont pas des synonymes au niveau légal. Dans certains cas, il est possible que le locateur et le propriétaire sont deux personnes différentes. Par exemple, lorsque le propriétaire mandate la location de ses immeubles à une compagnie de gestion. Ainsi, il faut s’assurer que, lors de la signature du bail, le nom du propriétaire figure à titre de locateur dans la section A du bail ou qu’une modification à cet effet soit faite si on se trouve en cours de bail.

Ensuite, il est important de comprendre que l’on ne peut faire une reprise pour n’importe qui autour de nous. En fait, c’est l’article 1957 C.c.Q qui nous aiguille à ce niveau. On y indique que le locateur propriétaire peut principalement reprendre un logement pour l’habiter lui-même, pour ses enfants ou pour ses parents au premier degré. On comprend donc qu’à priori, on ne peut reprendre pour nos frères, sœurs, neveux, nièces, petits-enfants, etc. Toutefois, il existe une exception prévue au même article de la loi pour tout autre parent (ex. frères, sœurs, neveux, nièces, petits-enfants, etc.) ou allié (ex. : beaux-parents), mais uniquement dans le cas où le propriétaire est en mesure de démontrer au juge qu’il est le principal soutien de cette personne.

Par la suite, il faut faire des vérifications au niveau du locataire de qui on entend reprendre le logement. En vertu de l’article 1959.1 C.c.Q, un locateur propriétaire ne peut reprendre si le locataire cumule les 3 critères suivants : il est âgé de 70 ans ou plus, il occupe le logement depuis au moins 10 ans et a un revenu égal ou inférieur au revenu maximal lui permettant d’être admissible à un logement à loyer modique (revenu faible). Il faut bien faire attention ici au fait que c’est un cumul de ces 3 critères qui est requis, donc si j’ai un locataire qui habite le logement depuis 22 ans et a un revenu faible, mais qui est âgé de 45 ans, on peut tout de même reprendre son logement. Il existe aussi des exceptions permettant de reprendre même lorsque l’on fait face à un locataire qui cumule les 3 critères indiqués, tel que, entre autres, lorsque le bénéficiaire de la reprise est lui-même âgé de 70 ans ou plus (exemple : mon locataire répond aux 3 critères, mais je veux reprendre le logement pour mes parents âgés de 80 ans).

Une fois qu’on établit que tous les critères ci-hauts sont remplis, il faut procéder de la bonne manière pour que la reprise soit valide. Si on prend le cas général du bail classique de 12 mois, débutant le 1er juillet et se terminant le 30 juin, il faut envoyer l’avis de reprise de logement au moins 6 mois avant l’expiration du bail (1960 C.c.Q). On comprend donc qu’un avis de reprise devra être transmis au plus tard le 31 décembre. Il faut faire bien attention au terme du bail et aux délais, puisque les délais changent dans les cas de baux à court terme (6 mois ou moins) et à durée indéterminée. Il existe d’ailleurs un tableau au dos du bail disponible également en ligne (https://www.tal.gouv.qc.ca/fr/droit-du-locateur-de-mettre-fin-au-bail/reprise-de-logement) concernant les différents délais à respecter selon le cas. De plus, l’avis comme tel doit aussi être conforme aux termes de l’article 1961 C.c.Q, qui énonce ce que l’avis doit inclure, tel que la date de la reprise, le nom du bénéficiaire et s’il y a lieu le degré de parenté avec le locataire, ainsi que le contenu de l’article 1959.1 C.c.Q. À noter qu’il n’est pas nécessaire de créer un avis de toutes pièces, puisqu’il existe un avis de reprise conforme sur le site web du Tribunal Administratif du logement, ainsi que sur le site web de la CORPIQ, pour ses membres.

Il est très important pour le propriétaire d’obtenir un accusé-réception de l’avis envoyé, puisque le locataire aura un délai d’un mois suivant la réception de l’avis pour donner sa réponse. De plus, si le locataire ne répond pas à l’avis, son silence équivaut à un refus de quitter le logement (1962 C.c.Q). Quelques options de transmission sécuritaire seraient la remise en main propre avec une signature d’accusé-réception par le/les locataire(s) concerné(s), l’envoi par poste recommandée avec signature (s’assurer que le locataire aille récupérer la poste, sinon ce n’est pas valide) et l’huissier de justice.

En cas d’acceptation, il faut conserver la preuve de la réponse positive précieusement, afin d’avoir des recours si jamais le locataire change d’idée et décide de ne pas quitter le logement à la date prévue de la reprise. Si cela se produit, il faudra que le propriétaire entreprenne une demande d’expulsion du locataire après la fin du bail au Tribunal administratif du logement.

En cas de refus, que ce soit dû au silence du locataire ou à une réponse concrète négative de la part de ce dernier, le propriétaire aura un mois à partir de la réception du refus pour entamer une demande de reprise de logement au Tribunal Administratif du logement (1963 C.c.Q). Une audience sera fixée par le Tribunal pour que le juge décide si la reprise aura lieu ou pas. Il est fortement recommandé que le bénéficiaire de la reprise vienne témoigner à l’audience pour bien exprimer son désir et son besoin d’habiter le logement en question de bonne foi, preuves à l’appui selon le cas. Le juge se prononcera aussi sur le montant de compensation (initialement non prévu sur l’avis de reprise comme tel), qui devrait correspondre aux frais de déménagement raisonnables (1967 C.c.Q), mais qui peut s’élever à plus que cela, selon ce que le juge considère juste et raisonnable.

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